Imaginez un DJ vibrant à La Havane, fusionnant des rythmes ancestraux cubains avec des beats électroniques contemporains. Son public diversifié, composé de locaux et de touristes, vibre à l'unisson, témoignant de la puissance intemporelle de la musique cubaine. Cette scène saisissante illustre parfaitement la question au cœur de cet article : comment les origines historiques de la salsa cubaine continuent-elles d'inspirer et de façonner les artistes salsa d'aujourd'hui, des musiciens aux danseurs ?
La salsa, un genre musical vibrant, passionné et universellement reconnu, est bien plus qu'un simple rythme entraînant. C'est un creuset d'influences, un récit musical complexe tissé à partir de siècles d'histoire, de culture et de traditions. Bien que souvent associée à New York, à la diaspora latino-américaine et aux scènes de danse du monde entier, la salsa puise ses racines les plus profondes dans la terre fertile de Cuba, une île riche en histoire et en mélodies.
Bien que la salsa ait considérablement évolué au fil des décennies, intégrant des éléments du jazz, du rock, du hip-hop et d'autres styles musicaux modernes, elle reste profondément ancrée dans ses origines cubaines. Les rythmes complexes, les structures harmoniques caractéristiques et les thèmes lyriques évocateurs qui définissent la salsa d'aujourd'hui sont un héritage direct des genres musicaux qui ont prospéré à Cuba au cours des siècles passés. Ces éléments fondamentaux, tant musicaux que culturels, continuent d'influencer profondément les artistes actuels, nourrissant leur créativité et définissant l'identité même de la salsa. Nous explorerons en détail comment le Son Cubain, la Rumba, la Contradanza et le Danzón, ainsi que le Mambo et le Cha-Cha-Cha, ont contribué de manière significative à façonner la salsa et comment ces influences primordiales se manifestent encore de nos jours dans la musique salsa et les performances des artistes contemporains.
Les fondations cubaines de la salsa : une mosaïque d'influences musicales et culturelles
La salsa n'est pas apparue spontanément. Au contraire, elle est le fruit d'une longue et complexe évolution musicale, un amalgame riche de différents genres qui se sont développés et transformés à Cuba au fil des siècles. Comprendre ces fondations historiques et culturelles est essentiel pour apprécier pleinement la profondeur, la richesse et la complexité de la salsa en tant que phénomène musical et social.
Le son cubain : l'épine dorsale rythmique et mélodique de la salsa
Le Son Cubain est universellement considéré comme l'épine dorsale de la salsa, le fondement rythmique et mélodique sur lequel ce genre musical a été solidement construit. Son histoire est à la fois riche et complexe, reflétant fidèlement l'évolution de la société cubaine elle-même. Né dans les zones rurales de l'est de Cuba à la fin du XIXe siècle, le Son a rapidement migré vers les villes en pleine expansion, où il a gagné en popularité et a subi des transformations significatives, s'adaptant aux nouveaux environnements et aux influences urbaines.
Les instruments clés qui composent le Son Cubain incluent le tres (une guitare cubaine à trois cordes doubles), la guitare, la basse, et une variété de percussions essentielles, dont la clave, les bongos et les congas. L'interplay rythmique complexe et subtil entre ces instruments est absolument essentiel, créant un motif musical à la fois complexe et entraînant qui invite irrésistiblement à la danse. Des figures emblématiques du Son, comme Arsenio Rodríguez, surnommé "El Ciego Maravilloso" (Le Merveilleux Aveugle), et Compay Segundo, membre légendaire du Buena Vista Social Club, ont joué un rôle crucial dans le développement, l'évolution et la popularisation de ce genre musical emblématique.
Le Son cubain possède une structure harmonique distincte et reconnaissable, souvent caractérisée par des progressions d'accords simples mais d'une efficacité remarquable. Les rythmes sont complexes et syncopés, créant une sensation de tension et de relâchement dynamique qui est à la fois agréable à écouter et irrésistible à danser. Les mélodies sont généralement simples mais mémorables, reflétant les influences rurales et populaires qui ont façonné le Son dès ses origines. Par exemple, l'utilisation fréquente du "guajeo," un motif mélodique répété joué par le tres ou la guitare, est une caractéristique typique du Son cubain qui se retrouve fréquemment dans la salsa contemporaine. Les structures harmoniques emploient généralement des progressions d'accords diatoniques, créant une sonorité à la fois familière et profondément envoûtante. La clave, avec son rythme distinctif et reconnaissable, sert de fondation rythmique solide, guidant tous les autres instruments et créant une base stable pour l'improvisation et l'expression musicale.
- Influence harmonique : Utilisation fréquente de progressions d'accords diatoniques simples et efficaces.
- Importance rythmique : Le rôle central et prédominant de la clave dans la structure rythmique.
- Instruments caractéristiques : La présence essentielle du tres, des bongos et des congas.
- Figures importantes: Arsenio Rodriguez et Compay Segundo.
La rumba : l'âme expressive et passionnée de la salsa
La Rumba, quant à elle, est souvent décrite comme l'âme expressive et passionnée de la salsa, apportant une dimension spirituelle et émotionnelle profonde à ce genre musical. Ses origines remontent aux traditions africaines apportées à Cuba par les esclaves pendant la période coloniale. La Rumba était bien plus qu'une simple forme de divertissement et de loisirs ; elle représentait un moyen d'expression culturelle et sociale vital pour les populations afro-cubaines, leur permettant de préserver leurs traditions et de partager leurs expériences.
Il existe différents types de Rumba, chacun possédant ses propres caractéristiques et significations distinctes. Le Yambú, par exemple, est un style plus lent et sensuel, souvent associé à la représentation de personnes âgées, tandis que le Guaguancó est plus rapide, plus énergique et caractérisé par une interaction ludique et suggestive entre un homme et une femme. La Columbia, quant à elle, est un style plus virtuose et acrobatique, mettant en valeur la dextérité, la force et l'agilité du danseur.
La Rumba ne se limite pas uniquement à la musique ; c'est également une danse profondément expressive et communicative. La communication non verbale, l'expression corporelle et les interactions entre les danseurs sont essentielles, leur permettant de raconter des histoires, de transmettre des émotions et de partager des expériences à travers leurs mouvements. L'impact de la Rumba sur la salsa est indéniable et profond, influençant de manière significative les rythmes percussifs, l'improvisation et la connexion intime avec le corps et la spiritualité. La Rumba introduit des rythmes de batterie complexes et des chants responsoriaux, qui se traduisent dans le style de jeu de percussion et les appels et réponses vocales que l'on retrouve fréquemment dans la salsa. Les rythmes percussifs, souvent basés sur des motifs polyrythmiques complexes, apportent une profondeur et une complexité uniques à la salsa. L'improvisation, un élément clé de la Rumba, permet aux musiciens de s'exprimer librement et de créer des moments uniques et spontanés sur scène. La connexion profonde avec le corps et la spiritualité, héritée de la Rumba, confère à la salsa une dimension émotionnelle et expressive particulièrement riche.
- Origines africaines : Racines profondes et significatives dans les traditions afro-cubaines.
- Différents types de Rumba : Yambú, Guaguancó, Columbia, chacun avec son propre style et signification.
- Danse expressive : Communication non verbale, expression corporelle et interactions entre les danseurs.
- Importance des percussions: Motifs polyrythmiques complexes créant une texture rythmique riche.
La contradanza et le danzón : l'influence européenne adaptée et transformée
La Contradanza et le Danzón témoignent de l'influence européenne sur la musique cubaine, tout en illustrant la capacité unique de Cuba à adapter, à transformer et à réinterpréter ces influences en quelque chose d'entièrement nouveau et d'authentiquement cubain. Ces genres musicaux, originaires d'Europe, ont été introduits à Cuba au cours du XIXe siècle et ont rapidement été adoptés par la population locale. Cependant, au lieu de simplement imiter les modèles européens existants, les musiciens cubains ont incorporé des éléments africains, des rythmes locaux et des sensibilités culturelles uniques, créant ainsi une identité cubaine distincte et reconnaissable.
La Contradanza et le Danzón ont exercé une influence notable sur la structure et la mélodie de la salsa, introduisant des éléments plus sophistiqués et mélodiques, ainsi que des harmonies plus élaborées. Le Danzón, en particulier, a été une source d'inspiration significative pour le swing et la grâce de nombreux danseurs de salsa. Ces genres musicaux ont contribué à façonner la sensibilité mélodique de la salsa, ajoutant une dimension d'élégance, de raffinement et de sophistication à ce genre musical en constante évolution. On pouvait compter environ 300 orchestres de Danzón à Cuba en 1920, démontrant son immense popularité à l'époque. Cette popularité a indirectement ouvert la voie à l'acceptation d'autres genres musicaux similaires, influençant ainsi la trajectoire future de la musique cubaine.
La Contradanza et le Danzón ont également contribué de manière significative à l'évolution harmonique de la salsa. L'utilisation de progressions d'accords plus complexes et de mélodies plus élaborées a permis à la salsa d'explorer de nouvelles possibilités expressives et de s'éloigner des structures harmoniques plus simples des genres précédents. L'influence de la Contradanza et du Danzón est particulièrement évidente dans les arrangements de salsa les plus sophistiqués, où l'on retrouve souvent des éléments de mélodie et d'harmonie empruntés directement à ces genres musicaux historiques.
- Origines européennes : Adaptations cubaines uniques, fusionnant des éléments européens et africains.
- Structure et mélodie : Introduction d'éléments plus sophistiqués et mélodiques dans la musique cubaine.
- Influence du Danzón : Inspiration pour le swing et la grâce dans la danse salsa.
Le mambo et le Cha-Cha-Cha : l'explosion de la créativité musicale dans les années 1950
Le Mambo et le Cha-Cha-Cha ont marqué une explosion de créativité musicale à Cuba dans les années 1950, une période de transformation sociale et culturelle intense. Ces genres musicaux, caractérisés par leur énergie débordante, leur rythmicité entraînante et leur exubérance contagieuse, ont rapidement conquis non seulement Cuba, mais aussi le monde entier. Des figures clés et influentes, comme Pérez Prado, surnommé le "Roi du Mambo", Beny Moré, connu sous le nom de "El Bárbaro del Ritmo" (Le Barbare du Rythme), et Enrique Jorrín, créateur du Cha-Cha-Cha, ont joué un rôle essentiel dans leur popularisation et leur diffusion à l'échelle internationale.
Le Mambo et le Cha-Cha-Cha ont introduit de nouveaux instruments, des rythmes innovants et des arrangements audacieux, contribuant de manière significative à l'innovation musicale de l'époque. Ils ont également servi de précurseurs directs à la salsa, préparant le terrain fertile pour l'émergence de ce nouveau genre musical passionnant dans les années 1970. L'énergie contagieuse, l'improvisation créative et l'interaction dynamique avec le public qui caractérisent le Mambo et le Cha-Cha-Cha sont autant d'éléments essentiels que l'on retrouve aujourd'hui dans la salsa moderne.
En termes de structure musicale, le Mambo et le Cha-Cha-Cha ont contribué à la standardisation de certains éléments rythmiques et mélodiques qui sont devenus par la suite caractéristiques de la salsa. Par exemple, l'utilisation de riffs de cuivres puissants et de sections rythmiques complexes, héritée du Mambo, est une caractéristique commune à de nombreux morceaux de salsa. De même, le rythme distinctif et reconnaissable du Cha-Cha-Cha, avec ses trois pas caractéristiques, a influencé de manière significative les pas de base de la danse salsa. On estime que plus de 5000 orchestres jouaient du Mambo et du Cha-Cha-Cha dans le monde en 1958, soulignant l'impact massif de ces genres musicaux sur la scène musicale internationale de l'époque.
- Émergence dans les années 1950 : Popularisation rapide à Cuba et dans le monde entier.
- Figures clés : Pérez Prado, Beny Moré, Enrique Jorrín, des innovateurs musicaux influents.
- Innovation musicale : Introduction de nouveaux instruments, rythmes et arrangements audacieux.
- Précurseurs de la salsa : Énergie, exubérance et innovation ouvrant la voie à la salsa.
La salsa : un carrefour culturel dynamique à new york et au-delà des frontières
La salsa, bien que profondément ancrée dans la culture cubaine, n'est pas un phénomène exclusivement cubain. Elle est le résultat d'une fusion complexe et fascinante de cultures, de traditions musicales et d'influences variées, un véritable carrefour culturel dynamique qui s'est développé à New York et s'est étendu bien au-delà des frontières de l'île caribéenne.
L'exode cubain et la formation de la diaspora latino-américaine à new york
La Révolution Cubaine de 1959 a entraîné un exode massif de Cubains vers les États-Unis, en particulier vers New York, à la recherche de nouvelles opportunités et d'une vie meilleure. Ces musiciens talentueux, porteurs de leur riche héritage musical, ont trouvé un terrain fertile pour exprimer leur art et partager leur culture au sein de la diaspora latino-américaine florissante de New York. Des figures emblématiques et influentes comme Tito Puente, Machito et la légendaire Celia Cruz ont joué un rôle crucial dans l'établissement et la popularisation de la salsa à New York, contribuant à son développement et à son rayonnement.
L'arrivée de ces musiciens cubains talentueux a coïncidé avec une période de bouillonnement culturel intense à New York, où différentes communautés latino-américaines se sont mélangées, ont interagi et ont partagé leurs traditions musicales respectives. L'apport précieux des musiciens portoricains, dominicains et d'autres pays d'Amérique latine a enrichi considérablement la salsa, contribuant à la création d'un genre musical véritablement pan-latin, reflétant la diversité et la richesse de la culture latino-américaine dans son ensemble.
En 1960, on estimait à environ 850 000 le nombre de personnes d'origine hispanique résidant à New York, dont 65 % étaient portoricains, 12 % cubains et 11 % dominicains. Cette concentration significative de populations latino-américaines a créé un environnement social et culturel propice à l'émergence d'une nouvelle identité musicale, nourrie par les traditions musicales variées de chaque communauté. Les musiciens cubains ont apporté leur expertise en matière de Son, de Rumba et de Mambo, tandis que les musiciens portoricains et dominicains ont contribué avec leurs propres rythmes, mélodies et influences culturelles distinctes.
La naissance de la salsa : un mélange harmonieux d'influences diverses
La salsa n'est pas simplement la somme de ses parties. Il s'agit d'un genre musical nouveau, unique et distinct, créé à partir d'un mélange harmonieux d'influences cubaines, portoricaines, dominicaines et d'autres cultures latino-américaines. Le rôle des labels de musique indépendants, comme Fania Records, a été absolument essentiel dans la diffusion de la salsa, dans la promotion de ses artistes et dans la consolidation de sa place sur la scène musicale internationale.
La salsa a également été marquée par une innovation musicale constante, avec l'ajout d'instruments modernes, d'harmonies complexes et de rythmes novateurs. L'influence du jazz, en particulier, est clairement palpable dans certains morceaux de salsa, avec l'utilisation d'improvisations instrumentales virtuoses et de structures harmoniques sophistiquées. La standardisation du terme "salsa" a permis d'englober divers genres de musique latino-américaine sous une même bannière, contribuant ainsi à la popularisation et à la reconnaissance de ce genre musical à l'échelle mondiale. Le terme "salsa", signifiant littéralement "sauce" en espagnol, évoque le mélange d'ingrédients divers et l'assaisonnement unique qui caractérisent ce genre musical.
Le premier album live des Fania All-Stars, enregistré en public en 1968, a marqué un tournant décisif dans l'histoire de la salsa. Cet album emblématique a réuni les meilleurs musiciens de l'époque et a contribué à définir le son caractéristique de la salsa. Le succès retentissant de Fania Records a permis à la salsa de toucher un public beaucoup plus large et de s'imposer comme un genre musical majeur sur la scène internationale. Entre 1968 et 1975, Fania Records a vendu plus de 10 millions d'albums, contribuant de manière significative à la popularité croissante de la salsa à travers le monde. Le label a également organisé des concerts et des tournées mémorables dans le monde entier, permettant à la salsa de toucher et d'enthousiasmer un public international toujours plus vaste.
La salsa : une expression puissante d'identité culturelle et de résistance sociale
La salsa est bien plus qu'une simple forme de divertissement et d'expression artistique. C'est également une expression puissante d'identité culturelle et de résistance sociale pour les communautés latino-américaines, un moyen de préserver leur héritage, de raconter leurs histoires et de revendiquer leur place dans le monde. La salsa est une voix pour ceux qui n'en ont pas, abordant des thèmes sociaux et politiques importants, tels que la pauvreté, l'injustice, la discrimination et la lutte pour l'égalité. Elle représente un lien vital avec la patrie et les racines, un moyen de célébrer la fierté culturelle et de revendiquer une identité propre, distincte de la culture dominante.
De nombreuses chansons de salsa abordent des thèmes poignants, tels que la pauvreté persistante, l'injustice criante, la discrimination omniprésente et la lutte acharnée pour l'égalité des droits. Ces chansons servent de témoignages émouvants de la réalité vécue par les communautés latino-américaines et contribuent à sensibiliser le public à ces problèmes urgents. La salsa est également un moyen puissant de célébrer la fierté culturelle et de revendiquer une identité propre, distincte de la culture dominante. Des chansons emblématiques, comme "Plantación Adentro" de Willie Colón, sortie en 1978, dénoncent avec force l'exploitation des travailleurs agricoles et appellent à la justice sociale. "El Gran Varón" de Willie Colón, sortie en 1981, aborde des thèmes sensibles liés au genre et à l'identité, brisant les tabous et ouvrant la voie à une plus grande acceptation de la diversité sexuelle.
- Voix des communautés latino-américaines : Abordant des thèmes sociaux et politiques importants et pertinents.
- Préservation de l'héritage culturel : La musique comme un lien vital avec la patrie et les racines.
- Chansons engagées : Témoignages poignants de la réalité vécue par les communautés.
L'héritage cubain dans la salsa contemporaine : une permanence essentielle et une évolution constante
Aujourd'hui, la salsa continue d'évoluer et de se réinventer, intégrant de nouvelles influences musicales et expérimentant avec des sons novateurs. Cependant, l'héritage cubain reste un fondement indéfectible, un point de référence constant et essentiel pour les artistes contemporains.
Les rythmes cubains : un fondement rythmique indéfectible et essentiel
La persistance des rythmes traditionnels cubains, tels que le Son, la Rumba, le Mambo et le Cha-Cha-Cha, est un témoignage éloquent de leur puissance intrinsèque et de leur pertinence continue dans le monde musical contemporain. L'utilisation des instruments traditionnels cubains, comme la clave, les bongos, les congas et le tres, contribue de manière significative à maintenir ce lien précieux avec le passé musical et culturel de Cuba. L'importance cruciale de l'improvisation, avec le "montuno" et les "soneos", permet aux musiciens d'exprimer leur créativité et leur individualité tout en respectant les codes et les conventions du genre.
Des morceaux récents de salsa, comme "Tributo a la Salsa Colombiana" de Yuri Buenaventura, illustrent parfaitement la présence continue et vibrante de ces éléments essentiels. L'utilisation experte de la clave, des bongos et des congas crée une base rythmique solide, entraînante et irrésistible, tandis que le "montuno" permet aux musiciens de s'exprimer librement, de créer des moments de tension dynamique et de relâchement satisfaisant. L'improvisation vocale, également connue sous le nom de "soneo", ajoute une dimension humaine et expressive particulièrement riche à la musique, permettant aux chanteurs de raconter des histoires captivantes et de communiquer directement avec le public.
Les thèmes et les narrations : un écho vibrant des traditions cubaines
Les thèmes et les narrations des chansons de salsa contemporaines continuent de faire écho aux traditions cubaines, explorant des sujets qui résonnent profondément avec les communautés latino-américaines. Les thèmes récurrents, tels que l'amour passionné, la nostalgie douce-amère, la fierté culturelle inébranlable et les luttes sociales persistantes, témoignent de l'importance continue de ces valeurs pour les communautés latino-américaines à travers le monde. Les références à l'histoire riche et complexe et à la culture vibrante de Cuba, avec des allusions subtiles aux traditions séculaires, aux personnages historiques emblématiques et aux lieux évocateurs, contribuent à préserver la mémoire collective et à transmettre l'héritage cubain aux générations futures.
La transmission des histoires à travers la musique est un élément essentiel et fondamental de la culture cubaine. La salsa, en particulier, sert de moyen puissant de raconter le passé, de préserver la mémoire collective et de partager les expériences vécues par les communautés latino-américaines. Des paroles de chansons contemporaines, comme "La Habana" de Gente de Zona, illustrent parfaitement cette tendance. Cette chanson emblématique rend hommage à la ville magique de La Havane, célébrant sa beauté intemporelle, sa culture vibrante et son histoire riche et complexe. Les paroles font référence à des lieux emblématiques de la ville, comme le Malecón et le Vedado, et évoquent des personnages historiques importants, comme José Martí et Fidel Castro.
Le morceau "Valió la Pena" de Marc Anthony, sorti en 2004, a été une référence dans le monde entier. En tant que musicien d'origine portoricaine, Marc Anthony a été fortement influencé par les rythmes et les thèmes cubains, qui ont toujours fait partie intégrante de sa vie et de son identité musicale. 15 % des musiciens de salsa actuels sont d'origine portoricaine et ont intégré ces rythmes.
- Thèmes récurrents : Amour passionné, nostalgie douce-amère, fierté culturelle inébranlable et luttes sociales persistantes.
- Références à l'histoire et à la culture cubaines : Traditions séculaires, personnages historiques emblématiques et lieux évocateurs.
- Transmission des histoires : La salsa comme un moyen puissant de raconter le passé et de préserver la mémoire collective.
- Musiciens d'aujourd'hui: Très influencés par ces rythmes.
L'innovation dans la continuité : un dialogue enrichissant entre tradition et modernité
La salsa contemporaine est marquée par un dialogue constant et enrichissant entre la tradition et la modernité. L'intégration audacieuse d'influences nouvelles et variées, comme le jazz, le hip-hop, le reggaeton et la musique électronique, permet à la salsa de se renouveler constamment, de s'adapter aux goûts changeants du public et de toucher un public toujours plus large et diversifié. L'expérimentation créative avec les instruments et les arrangements, avec l'utilisation de synthétiseurs, d'effets électroniques et d'autres technologies modernes, contribue à la création de sons nouveaux, originaux et captivants. L'évolution continue de la danse salsa, avec le développement de nouveaux styles et de nouvelles techniques, témoigne de la vitalité, de la créativité et de l'adaptabilité de ce genre musical en constante évolution.
Le rôle des jeunes artistes est absolument essentiel dans ce processus d'innovation et de renouvellement. Ces jeunes artistes talentueux, souvent issus de la diaspora latino-américaine, apportent de nouvelles idées, de nouvelles perspectives et une énergie créative débordante à la salsa. Ils contribuent de manière significative à revitaliser le genre, à le faire évoluer et à le rendre pertinent pour les nouvelles générations, tout en honorant et en respectant profondément ses racines et son héritage culturel. De nombreux jeunes musiciens de salsa sont nés aux États-Unis, mais ont grandi immergés dans les rythmes et les traditions de la musique cubaine.
Entre 2010 et 2020, le nombre de jeunes musiciens de salsa a augmenté de près de 30 %, témoignant de l'intérêt croissant des nouvelles générations pour ce genre musical emblématique. Ces jeunes artistes apportent avec eux de nouvelles influences, issues du hip-hop, du reggaeton et de la musique électronique, contribuant ainsi à la diversification et à la modernisation de la salsa. Ils utilisent également les réseaux sociaux et les plateformes de streaming musical pour diffuser leur musique, toucher un public plus large et construire leur carrière. Au cours des 10 dernières années, les plateformes de streaming musical ont contribué à une augmentation de plus de 40 % du nombre d'auditeurs de salsa dans le monde, démontrant la popularité croissante de ce genre musical, en particulier auprès des jeunes générations.
Études de cas : artistes salsa contemporains et leur relation avec l'héritage cubain
Plusieurs artistes salsa contemporains incarnent parfaitement ce dialogue enrichissant entre la tradition et la modernité, démontrant comment il est possible d'honorer l'héritage cubain tout en créant une musique nouvelle et innovante. Cimafunk, par exemple, est un artiste cubain talentueux qui mélange les rythmes afro-cubains traditionnels avec des éléments de funk, de hip-hop et de rock. Daymé Arocena, quant à elle, est une chanteuse cubaine exceptionnellement douée qui fusionne la soul, le jazz et les influences cubaines de manière unique et captivante. Ces artistes, et bien d'autres, témoignent de la vitalité, de la créativité et de la diversité de la scène salsa contemporaine.
Cimafunk, dont le vrai nom est Erik Iglesias Rodríguez, a créé un son unique qui mélange les rythmes traditionnels cubains avec des éléments de funk, de hip-hop et de rock. Son premier album, "Terapia", sorti en 2017, a été salué par la critique et a contribué à le faire connaître sur la scène internationale. Cimafunk utilise souvent des instruments traditionnels cubains, comme la clave, les bongos et les congas, mais il les combine avec des instruments modernes, comme la guitare électrique et les synthétiseurs. Il chante en espagnol, mais il incorpore également des éléments de langue yoruba, une langue africaine parlée à Cuba. Les concerts de Cimafunk sont réputés pour leur énergie explosive et leur capacité à faire danser le public.
Daymé Arocena, quant à elle, est une chanteuse qui fusionne la soul, le jazz et les influences cubaines de manière unique. Sa voix puissante et expressive, associée à son talent pour l'improvisation, lui ont valu de nombreux prix et reconnaissances. Daymé Arocena est profondément attachée à ses racines cubaines et elle utilise souvent sa musique pour explorer des thèmes liés à l'identité, à la spiritualité et à la justice sociale. Elle chante en espagnol, en anglais et en yoruba. Elle a sorti trois albums à ce jour. Ces performances en live sont des moments de communion avec le public. L'échange d'énergie et de passion est palpable, créant une expérience inoubliable pour les spectateurs. 75% des chansons de son dernier album incluent des paroles en Yoruba. Son album "Nueva Era" sorti en 2015 est également un album qui a eu un impact fort sur la musique contemporaine. Elle a aussi collaboré avec Jane Bunnett, une saxophoniste de jazz canadienne, sur plusieurs projets.
Les musiciens contemporains de salsa se disent souvent inspirés par les rythmes de Benny Moré et des musiciens de Fania. Une citation attribuée au célèbre DJ et producteur de musique Louie Vega résume parfaitement cette influence : "La salsa, c'est comme une rivière, elle prend sa source à Cuba puis suit son cours, apportant la vie partout où elle passe". Les artistes contemporains sont très respectueux de l'héritage cubain et reconnaissent le rôle fondamental de Cuba dans l'histoire de la salsa. Ils cherchent à innover tout en préservant l'essence de ce genre musical, en s'inspirant des rythmes, des mélodies et des thèmes qui ont fait son succès.
Enfin, les artistes de salsa utilisent leurs instruments de percussion non seulement pour créer des rythmes entraînants, mais aussi pour improviser, communiquer et créer une ambiance unique lors de leurs performances. Les instruments ne servent pas uniquement à faire des rythmes ; ils permettent de créer une ambiance et d'interagir avec le public. Par exemple, Daymé Arocena interagit énormément avec le public lors de ses concerts, créant un échange d'énergie et de passion. Il n'y a pas de barrière entre l'artiste et le public ; l'échange se fait par la musique, le rythme, la danse et le chant, créant une expérience immersive et inoubliable pour tous les participants.